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Le pain de vie et les miracles de la Bible (prédication d'Antoine Nouis du 14/6/2020)

Lire Jn 6.51-54,60,61

J’ai associé les versets 60 et 61 à l’évangile du jour, car ils vont nous aider à comprendre le récit.

C’est la seule fois dans les évangiles que l’on voit des disciples quitter Jésus. Je me suis longtemps demandé ce qu’il y avait de dur à entendre dans le discours de Jésus sur le pain de vie. Je me souviens avoir noté dans un cahier dans lequel j’écris mes réflexions bibliques et spirituelles qu’il devait être difficile pour les disciples de penser qu’ils ne sont pas maîtres de leur vie, ou alors qu’il était pour eux scandaleux que d’imaginer devoir manger la chair de Jésus, mais ces réponses ne me convainquaient pas pleinement. Un jour, j’ai trouvé une autre réponse que je souhaiterais vous faire partager. Pour entendre cette autre réponse, il faut inscrire le départ des disciples dans l’ensemble du chapitre 6 de l’évangile de Jean que je résume ainsi.

1-15 Multiplication des pains

14-15 : « À la vue du signe qu'il avait produit, les gens disaient : C'est vraiment lui, le Prophète qui vient dans le monde. Jésus, sachant qu'ils allaient venir s'emparer de lui pour le faire roi, se retira de nouveau sur la montagne, seul. »

16-21 : Les disciples traversent en barque, Jésus les rejoint en marchant sur la mer. Ils sont rattrapés par la foule.

26-29 : Jésus interprète le signe de la multiplication des pains en les appelant à manger le pain qui demeure en vie éternelle.

30-31 : « Ils lui dirent alors : Quel signe produis-tu donc, toi, pour que nous voyions et que nous te croyions ? Quelle œuvre fais-tu ? Nos pères ont mangé de la manne au désert. »

32-59 : Jésus est le pain de vie

60,66 : Parole dure à entendre… des disciples quittent Jésus.

Le départ des disciples est bien la conséquence du discours sur le pain de vie, mais ce discours lui-même est une explication du miracle de la multiplication des pains, ce qui nous pose la question des miracles.

Après la multiplication des pains, la foule veut faire de Jésus son roi, mais il se retire. La foule le rattrape et lorsque Jésus commence son discours, on lui dit : Quel signe produis-tu donc, toi, pour que nous voyions et que nous te croyions ? Le lendemain du jour où elle veut le faire roi, la foule lui demande un nouveau signe.

Un proverbe dit que lorsqu’un doigt désigne la lune, l’imbécile regarde le doigt. Le miracle est le doigt et le pain de vie est la lune, mais la foule reste fixée sur le doigt.

La foule et les disciples qui ont quitté Jésus s’attendaient à ce qu’ils renouvellent le miracle. Ce serait tellement bien, si le Christ nous envoyait tous les jours le manger et le boire ! Ils ne sont pas prêts à entendre que c’est sa parole qu’ils doivent manger tous les jours pour nourrir leur foi.

Nous trouvons le même enchaînement à la fin du chapitre 2 de l’évangile de Jean. Il est dit que pendant que Jésus était à Jérusalem, « beaucoup mirent leur foi en son nom, à la vue des signes qu'il produisait » (Jn 2.23). On se réjouit de voir que de nombreux hommes se sont convertis, mais les versets qui suivent refroidissent notre enthousiasme : «  Mais Jésus, lui, ne se fiait pas à eux, parce qu'il les connaissait tous… lui-même connaissait ce qui était dans l'homme. » Jésus qui connaît le cœur de l’homme sait que le miracle est peu capable de le faire changer ne profondeur !

Un troisième exemple se trouve dans le livre de l’Exode qui présente l’enchaînement suivant :

Chap 12 : Mort premiers-nés égyptiens - les Israélites sont épargnés.

Chap 14 : La mer des Joncs coupée en deux.

Chap 14 : Armée de Pharaon est noyée.

Chap 16 : La manne comme nourriture.

Chap 17 : L’eau jaillie du rocher.

Chap 19-24 : Troisième mois : Dieu fait alliance avec son peuple.

Chap 25-31 : Instructions sur le sanctuaire.

Chap 32 : Idolâtrie du veau d’or

Les commentaires se sont demandé pourquoi le peuple qui avait connu tant de miracles en deux mois (les Israélites épargnées par la mort des premiers-nés + la mer coupée en deux + l’armée de Pharaon engloutie + la manne et les cailles + l’eau jaillie du rocher) est en même temps le peuple qui est tombé dans la plus grande des idolâtries ? Comment ont-ils été assez stupides pour penser que c’est un veau qu’ils ont eux-mêmes fondu qui les a sauvés.

Un philosophe juif contemporain a répondu à cette question en écrivant : « « Les miracles sont inaptes à transformer la nature humaine, ils peuvent tout au plus l’ébranler sur le moment… seuls une éducation continue, des efforts soutenus, une discipline quotidienne… peuvent préserver un peuple de retomber dans l’idolâtrie qui revêt toutes formes et qui s’insinue sournoisement jusqu’au sein de notre société moderne. » Dans la même veine, Jésus aurait dit : « « Les miracles sont inaptes à transformer la nature humaine, c’est la nourriture quotidienne du pain de vie qui fera de vous des disciples. »

Pour illustrer cela, je vous propose une devinette : Quelle est la différence entre la soif d’eau et la soif de miracles ? Réponse : Quand on a bu un verre d’eau, on n’a plus soif. Le problème du miracle est qu’on en veut toujours plus, ça devient une addiction.

Je voudrais terminer cette méditation avec trois illustrations issues de trois traditions différentes.

Dans la tradition musulmane, un homme est allé voir un disciple d’un maître spirituel pour lui dire : « Pourquoi votre maître cache ses miracles. J'ai personnellement recueilli des données qui montrent qu’il a guéri des gens par le pouvoir de sa prière, mais leur disait que c'était dû au pouvoir de la nature. Pourquoi fait-il cela ? » Le disciple a répondu : « Je sais parfaitement de quoi vous parlez, parce que j'ai observé ces choses-là moi-même. D'abord, le Maître a horreur d'être un centre d'attraction. Deuxièmement, il est persuadé que, une fois que les gens ont développé quelque intérêt pour le miraculeux, ils n'ont aucun désir d'apprendre quoi que ce soit sur les valeurs spirituelles véritables. » Dans la même veine, nous pouvons citer l’exemple de l’apôtre Paul. À Corinthe, son ministère est attaqué par des hyper spirituels qui lui reprochent de manquer d’éloquence et de ne pas faire assez de miracles (2 Co 10.10). Dans sa réponse, Paul commence par évoquer une extase qu’il a eue quelques années plus tôt. Une façon de dire que si ses adversaires veulent entrer dans une compétition d’expériences spirituelles, il aurait des arguments à avancer, mais il ajoute aussitôt qu’il serait fou de le faire. À ceux qui lui reprochent de ne pas faire assez de miracles, il répond en racontant l’expérience d’une prière qui n’a pas été exaucée. C’est la fameuse écharde dans sa chair. C’était probablement une maladie ou une infirmité qui le gênait dans son ministère. Il a demandé la guérison et il ne l’a pas obtenue, mais il a reçu une parole : « Ma grâce te suffit car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (2 Co 12.9). Paul a été témoin en faisant de son écharde un signe de la grâce. Pour lui cette présence du Christ en lui tous les jours est plus importante que la guérison.

La tradition rabbinique raconte l’histoire d’un homme dont la femme est morte en donnant naissance à un enfant. Ne sachant comment faire pour nourrir le nourrisson, le père a prié Dieu qui l’a exaucé en donnant du lait à son sein. L’homme a ainsi pu allaiter lui-même son enfant. Quand il est allé raconter ce miracle à des sages, le premier s’est écrié : « Quel juste es-tu pour que Dieu ait entendu ta prière et qu’il l’ait exaucé de façon si merveilleuse ! » Mais le second a dit : « Tu es un vaurien car tu as fatigué Dieu, tu n’avais qu’à chercher une nourrice ! » Le but de la spiritualité n’est pas de nous faire sortir du monde, mais d’y vivre en disciple.

La troisième illustration vient de John Wesley, le fondateur du méthodisme, un mouvement de réveil en Angleterre au XVIIIe siècle. Au commencement de ce réveil, il a été le témoin de signes spectaculaires : guérisons, extases, parler en langues, conversions en foules… En parlant de ces signes, il a écrit : « J’ai souvent observé que ces symptômes se manifestent plus ou moins au commencement des grands réveils… mais au bout de quelque temps, ces phénomènes diminuent et l’œuvre se poursuit dans le calme et le silence. Ceux qu’il plaît à Dieu d’employer dans son œuvre doivent être absolument passifs à cet égard ; ce n’est pas à eux, mais à Dieu, de choisir les conditions dans lesquelles s’accomplit son œuvre. » Je crois que Dieu peut faire des miracles aujourd'hui encore et nous devons rendre grâce, mais qu’il peut aussi ne pas en faire et nous devons rendre grâce. Comme l’a dit Wesley, nous devons être passifs à cet égard. Ce n’est pas dans le miracle que l’Évangile se joue !

Pour terminer, un témoignage. On raconte que le jeune Pascal a dit un jour à son père : « J’ai été au bénéfice d’un grand miracle aujourd'hui. Je suis tombé de mon cheval, et grâce à Dieu, je ne me suis pas fait mal. » Son père lui a répondu : « J’ai été au bénéfice d’un plus grand miracle que toi, car j’ai fait une promenade à cheval, et je ne suis pas tombé. » Le grand plus des miracles, c’est que je suis vivant, que je suis debout devant vous ce matin et que nous pouvons rendre un culte à notre Dieu. De cela rendons grâce !

 

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